Attitudes du public envers les immigrants et l’immigration dans les petites collectivités canadiennes
Victoria Esses, Université Western; Alina Sutter, Université Western; Leah Hamilton, Université Mount Royal; Antoine Bilodeau, Université Concordia; Paolo Palma, Université Western; Aurélie Lacassagne, Université Saint-Paul; Keith Neuman, Institut Environics; & Danielle Gaucher, Université du Manitoba
Dans le but de promouvoir une croissance démographique et économique équilibrée, le Canada s’est engagé à accroître l’immigration dans les petites collectivités situées en dehors des grandes villes canadiennes. Cette stratégie vise à revitaliser les régions qui ont du mal à maintenir leur niveau de population et à répartir les avantages de l’immigration dans tout le pays. Une étude récente menée par Esses et al. (2024) auprès des habitants de 11 petites collectivités canadiennes met en lumière leur attitude à l’égard des immigrants et de l’immigration, et offre des implications pratiques pour les chefs de file communautaires et les décideurs politiques.
L’enquête représentative a été menée en 2022 dans diverses collectivités, notamment Kamloops (C.-B.), Wood Buffalo (Alb.), Prince Albert (Sask.), Brandon (Man.), Thunder Bay (Ontario), Grand Sudbury (Ontario), Saint-Hyacinthe (Québec), Bathurst (Nouveau-Brunswick), Charlottetown (Île-du-Prince-Édouard), Cap-Breton (Nouvelle-Écosse) et St-Jean (Terre-Neuve-et-Labrador). En moyenne, les résidents de ces communautés avaient tendance à ne pas percevoir les niveaux d’immigration comme trop élevés, étaient tout à fait disposés à croire que ceux qui se disent réfugiés sont authentiques et que le gouvernement fédéral n’a pas perdu le contrôle de l’immigration. Les résidents étaient favorables à l’accueil d’immigrants possédant les compétences professionnelles nécessaires au Canada, ce qui reflète les attitudes et les politiques largement répandues en faveur de l’immigration économique. Cependant, il y avait plus d’incertitude quant à la capacité des immigrants à s’intégrer dans la société canadienne, en particulier en ce qui concerne l’adoption des valeurs canadiennes.
L’étude a révélé des différences intéressantes entre les collectivités et les facteurs prédictifs des attitudes. En particulier, c’est la proportion d’immigrants dans la population de la collectivité, et non la taille de la collectivité, qui prédisait les attitudes à l’égard de l’immigration et des réfugiés. Dans les collectivités où la proportion d’immigrants dans la population était plus élevée, comme Wood Buffalo (AB), où 21 % de la population est composée d’immigrants, les résidents étaient plus susceptibles de s’inquiéter du niveau d’immigration, de l’authenticité des réfugiés et de penser que le gouvernement fédéral avait perdu le contrôle de l’immigration. Un autre cas intéressant est celui de Saint-Hyacinthe (Québec), où, malgré une proportion d’immigrants plus faible (7 %), les résidents ont exprimé des préoccupations qui reflétaient peut-être le débat en cours sur l’immigration au Québec. À part cela, la tendance générale s’est maintenue et les attitudes étaient assez positives à St-Jean (Terre-Neuve-et-Labrador), où les immigrants représentent 5 % de la population, et au Cap-Breton, où ils représentent 2 % de la population.
Sur le plan démographique, les résidents plus jeunes, de sexe féminin, blancs et hautement scolarisés de ces collectivités étaient plus susceptibles d’avoir une attitude positive à l’égard de l’immigration. De plus, les répondants immigrants étaient plus susceptibles d’avoir une attitude positive à l’égard de l’immigration et moins susceptibles de croire que les immigrants n’adoptent pas les valeurs canadiennes et que le gouvernement a perdu le contrôle sur qui peut immigrer. Le revenu n’avait pas d’incidence significative sur les attitudes.
L’étude met en évidence les possibilités d’actions ciblées visant à promouvoir et à maintenir des attitudes positives dans les petites communautés canadiennes. Il s’agit, par exemple, de créer des programmes qui favorisent les interactions positives entre les résidents locaux et les immigrants dans les régions où ces derniers représentent une part importante de la population. En outre, les initiatives peuvent tirer parti des attitudes plus positives des femmes, des jeunes et des immigrants pour vanter les avantages de l’immigration. De même, les chefs de file communautaires peuvent envisager de mettre en œuvre des campagnes éducatives afin de mettre en avant les avantages économiques et sociaux de l’immigration et d’apaiser les inquiétudes des résidents. En encourageant les attitudes positives, les petites collectivités peuvent devenir plus accueillantes, ce qui a un impact positif sur leur capacité à attirer et à retenir les nouveaux arrivants.
L’article complet est disponible ici : Esses, V. M., Sutter, A., Hamilton, L. K., Bilodeau, A., Palma, P., Lacassagne, A., Neuman, K., & Gaucher, D. (2024). Public Attitudes Toward Immigrants and Immigration in Smaller Canadian Communities. Canadian Ethnic Studies, 56(3), 43-67. https://doi.org//10.1353/ces.2024.a939615
